Ménopause précoce : elles ne s’y attendaient pas mais elles font face !

Ménopause précoce : elles ne s’y attendaient pas mais elles font face !

Ménopause précoce : une annonce fracassante

Un bilan hormonal avec un taux de FSH élevé et d’œstrogène bas quand on est encore dans la trentaine voir la vingtaine, c’est souvent, synonyme de stupéfaction voire d’incompréhension. L’annonce formelle d’une ménopause par le corps médical est pour toutes un cap à passer, c’est, sans doute, encore plus vrai lorsque cet évènement survient tôt, de façon parfois complètement inattendu. Les femmes que nous avons rencontrées ont parcouru du chemin depuis l’annonce mais elle gardent des souvenirs intacts, précis et empreints d’émotion du moment où le diagnostic a été posé.

Karine évoque un coup de tonnerre quand sa gynécologue lui a annoncé, à l’âge de 35 ans, qu’elle était entrée en périménopause. « J’ai eu mon fils à 26 ans, avec mon mari, on a mené de front la vie familiale avec un petit enfant et l’installation sur le plan professionnel. À 33 ans, j’étais directrice de crèche, j’avais atteint mon objectif, on était à nouveau prêt et disponible pour accueillir un nouvel enfant. Je ne me suis pas trop inquiétée de ne pas tomber enceinte tout de suite. Entre le stress et la fatigue, ma libido n’était pas dingue non plus donc on ratait peut-être le coche de l’ovulation ! J’ai fini par consulter et là le coup de massue ! Je ne m’attendais pas du tout à ça ! Mon désir de second enfant a été foudroyé ! » Les plans d’Elisabeth, ménopausée à 27 ans, ont, eux, aussi été bouleversés. Elle avait beau se douter qu’elle connaîtrait la ménopause bien avant la plupart de ses amies car sa mère avait vécu l’arrêt des règles à l’aube de la quarantaine, elle n’avait pas envisagé que cela arrive aussi tôt. « Je connaissais mon histoire familiale, je savais que je « devais » enfanter le plus tôt possible mais je pensais avoir, au bas mot, jusqu’au milieu de la trentaine ! Et là alors que je n’ai pas de relation amoureuse sérieuse, personne avec qui me projeter, ma médecin m’explique que mes troubles du cycle sont purement et simplement la manifestation d’une ménopause précoce… J’avais beau avoir cette hypothèse dans un coin de ma tête, pour moi, c’était simplement beaucoup trop tôt. Je me suis effondrée. »

Chez Sophie, 38 ans, rien ne laissait présager une ménopause précoce, aucune femme de sa famille n’avait vécue cela. Sophie et son mari envisageaient d’agrandir leur famille mais au bout d’un an toujours pas de grossesse à l’horizon. « La première fois que j’ai eu ce que je pensais être un retard de règles, j’étais super contente! Ca y est, notre troisième bébé était en route ! Pourtant le test de grossesse s’est avéré négatif, le suivant aussi tout comme la prise de sang. C’était assez incompréhensible de mon point de vue et même si j’étais loin d’imaginer ce qui m’attendait, ça m’a un peu figé… Mes règles sont arrivées avec deux bonnes semaines de retard. Je me suis dis que je psychotais trop. Le cycle suivant a duré à peine trois semaines. Pas de faux espoir au moins. S’en est suivie une véritable anarchie, je ne m’y retrouvais plus, j’étais fatiguée, irritable, un peu las. J’ai consulté mon gynécologue qui m’a prescrit un bilan hormonal pour « voir où on en était». Le verdict ne s’est pas fait attendre et tenait en trois mots : insuffisance ovarienne précoce. C’est rien de dire que je ne l’avais pas vu venir!»

Claire a tout juste 31 ans quand elle reçoit l’une des pires nouvelles de sa vie après avoir souffert plusieurs semaines de douleurs pelviennes. « On m’a diagnostiqué une tumeur de l’ovaire. Tout va très vite mais on m’explique bien tout comme il faut, les traitements et leur répercussion. Je comprends que l’ovariectomie bilatérale m’empêchera d’avoir des enfants. C’est fou mais à ce moment là, ça ne me fait pas beaucoup d’effet, je ne percute pas tout de suite, je pense surtout que l’opération va me sauver la vie. J’allais bien deux mois avant et puis tout bascule ... »

Apprendre à vivre avec la ménopause précoce

Les semaines, mois et parfois années qui ont suivi l’annonce de la ménopause précoce n’ont pas été des plus sereins. Emotions exacerbées, sensations désagréables, sentiment d’injustice, impression de vieillir avant l’heure, angoisses existentielles et peur du déclin ont bouleversé Claire, Elisabeth, Sophie et Karine. Claire se souvient avoir été ébranlée mais s’être toujours accrochée à l’homme qui partage sa vie et à leur avenir commun. « Dire que je l’ai bien vécu serait un peu exagéré mais dans mon cas, c’était comme un deal avec mon corps. On enlève la tumeur et les ovaires qui vont avec, je ne serai plus féconde mais je ne meurs pas ! Mon compagnon m’a beaucoup soutenu, il m’a manifesté son attachement tout au long du parcours. On s’est projeté ensemble dans une vie, sans doute, sans enfant. Ca n’a pas été facile et ça ne l’est toujours pas, c’est un renoncement énorme, on a beaucoup pleuré mais on a décidé aussi de miser sur le positif : je suis là et nous serons fertiles autrement. Je ne sais pas comment j’aurais pu traverser cette épreuve seule. »

Karine, quant à elle, a affronté une phase difficile dont elle ne se cache pas avec notamment la manifestation de plusieurs symptômes brutaux. « C’était un peu comme si mon corps avait tout retenu pendant plusieurs mois et que d’un coup, il se lâchait. Bouffées de chaleur et insomnie puissance dix, l’humeur n’en parlons pas ! J’étais maussade. Je me sentais vieille. Mon mari essayait de bien faire en disant que ce n’était pas grave. Pour moi ça l’était. Notre couple a souffert lors de ce passage. Je lui en voulais car sa carrière décollait et qu’en plus, il paraissait toujours aussi jeune, lui ! Et moi j’étais toute rabougrie ! Pour être honnête, j’ai eu deux années difficiles. »

Déjà maman deux fois, Sophie a réussi à relativiser au sujet du troisième enfant qu’elle n’aurait pas mais elle s’est sentie mal dans sa peau, isolée et carrément en décalage avec ses amies. « J’ai mis beaucoup de temps à dire que j’étais ménopausée, même à mes proches. J’avais honte ! Personne autour de moi ne pouvait comprendre, il y avait encore pas mal de naissances dans mon entourage. Mes copines étaient en post-partum, parlaient d’allaitement et moi j’avais des bouffées de chaleur et les hormones en folie ! »

De son côté, Elisabeth a éprouvé une multitude de sentiments et d’émotions après l’annonce de la ménopause précoce : « De la tristesse, de la colère, de la rancune, de la jalousie, de l’incompréhension. Je suis aussi passée par la case déni. Ce n’était pas possible. Ma chance, c’est d’avoir une gynécologue en or, très professionnelle et très humaine. Elle a eu les bons mots et m’a exprimé beaucoup de bienveillance. Elle m’a suggéré de rejoindre un groupe de parole ou de suivre un accompagnement thérapeutique. Au bout de quelques semaines de déprime totale, j’ai compris que j’avais besoin d’une aide extérieure et j’ai contacté une psychologue. Je ne sais pas si un jour je serais complètement sereine vis à vis de ça et si je parviendrais à faire mon deuil de devenir maman mais je vais un peu mieux. »

Ménopause précoce : faire la paix avec son corps

On le sait, la ménopause, c’est un florilège de changements qui ne sont pas toujours faciles à accepter mais c’est aussi un état intermédiaire. Dès lors que les ajustements qu’ils soient physiologiques ou psychologiques ont été réalisés, acceptés, on renoue doucement vers un meilleur bien-être.

Physiquement, Sophie qui n’a jamais été très à l’aise avec son corps ne l’est pas davantage depuis l’arrêt des règles. « J’ai pris du poids qui s’est rajouté à celui que je n’avais pas perdu pour mes deux grossesses. Je suis parfois essoufflée et je transpire énormément. Je me rends à un cours de yoga et je nage une fois par semaine. Ca fait autant de bien à ma tête qu’à mon corps, ça nous permet de nous réconcilier. Ce qui me console, c’est que c’est une période de transition, ça ne durera pas toute la vie. »

Karine qui a maintenant 48 ans, a tourné la page depuis longtemps et l’équilibre est bel et bien retrouvé. « Je vois mes amies qui attaquent la ménopause et qui souffrent de certains maux, elles me posent des questions et me confient leurs angoisses. C’est positif car je partage mon expérience, je peux les rassurer. Mon corps a changé au moment de la ménopause mais maintenant, ça s’est stabilisé. Je suis active, en forme, je prends soin de moi, je fourmille de projets et d’envies. Une fois que j’ai été en mesure d’accepter, j’ai commencé à me sentir mieux. J’en ai voulu à mon corps de me faire ça ! »

Pour Elizabeth, toutes les angoisses n’ont pas été surmontées mais le travail thérapeutique se poursuit. « Petit à petit, j’intègre que la ménopause précoce n’a pas fait de moi une vieillarde. Ca n’empêche que je me sens plus vieille que mes copines du même âge. Il me reste beaucoup de choses à vivre et même si physiquement, il y a des désagréments, je suis quand même en bonne santé, je ne suis pas limitée. Le plus dur à vivre, c’est que je suis célibataire et je redoute que si je tombe amoureuse d’un homme, mon infertilité fasse peur et soit rédhibitoire pour poursuivre notre histoire. »

Aujourd’hui, un an après cet épisode douloureux, Claire ne cache pas les difficultés qui continuent à l’assaillir mais elle avance avec réalisme et positivité. « Je suis à l’âge où la plupart des filles qui m’entourent ont des projet de procréation, chaque annonce de grossesse ravive ma blessure, c’est certain, mais ma maladie m’a donné une sacrée pulsion de vie. N’exagérons rien, on n’en sort pas indemne, j’ai des gros passages à vide mais je mesure aussi ma chance. Je suis ménopausée avant l’heure mais vivante ! »